IDENTIFICATION DES ESPECES DE CHAMPIGNONS
ASSOCIEES AUX MYCORHIZES DES ARBRES TRUFFIERS.

 

MABRU D.1 , DOUET JP.2-4 , DUPRE C.1 , MEDINA B.2 , CHEVALIER G.1 , RICARD JM.3 CASTROVIEJO M.4
(1) : INRA, UMR 1095, 234 Avenue du Brézet 63039 Clermont-Ferrand Cedex.
(2) : DGCCRF, Université Bordeaux 1, 351 Cours de la libération 33405 Talence.
(3) : Ctifl Balandran.
(4): CNRS, REGER Université Bordeaux 2, 146 rue Léo Saignat 33076 Bordeaux cedex.

Mots-clés : truffes, mycorhizes, ITS, PCR, Tuber.

 

INTRODUCTION

En France, les truffes et spécialement les truffes noires du Périgord (Tuber melanosporum) sont très appréciées en gastronomie grâce à leurs qualités organoleptiques et représentent une activité économiquement importante que ce soit au niveau de la vente de plants truffiers ou des corps fructifères (1). Les truffes sont des champignons mycorhiziens à développement souterrain classées parmi les Eu-ascomycètes. Elles appartiennent à l'ordre des Tubérales et constituent le genre Tuber. Les mycorhizes, organes produits par l'association entre les racines de l'arbre hôte et le mycélium fongique, sont trouvées en grand nombre au niveau de l'appareil racinaire des plants truffiers. Si, la plupart des truffes peuvent être identifiées grâce aux caractères macro et microscopiques de leurs ascocarpes (corps fructifères), de leurs spores ou de leurs mycorhizes (2), certaines espèces économiquement importantes ne peuvent pas l'être par ces seuls critères morphologiques. La trufficulture moderne repose sur le renouvellement de l'outil de production basé principalement sur de nouvelles plantations mettant en uvre des plants mycorhizés selon des procédés mis au point par l'INRA (3). Les pépiniéristes produisent chaque année entre 400 et 450 000 plants truffiers. Certains, avant commercialisation, sont certifiés par des contrôles, réalisés par le ctifl ou l'INRA, basés sur la morphologie des mycorhizes.

L'arrivée, en France, de la truffe de Chine (4) (Tuber indicum) dont les mycorhizes sont morphologiquement très semblables à celles de la truffe noire du Périgord, a suscité une grande inquiétude chez les professionnels qui redoutent une introduction accidentelle ou volontaire de cette espèce dans l'écosystème trufficole français. De qualité inférieure, ayant une croissance beaucoup plus rapide, cette introduction pourrait représenter un risque écologique majeur. La truffe de Chine, par sa virulence, pourrait se répandre, rentrer en compétition avec la truffe indigène et la supplanter. Tuber brumale est également une espèce de truffe très proche morphologiquement de T. melanosporum, aussi ces deux espèces ont été longtemps confondues et vendues en mélange. La qualité inférieure de T. brumale pouvant nuire à l'activité économique générée par T. melanosporum, il est primordial, comme dans le cas de T. indicum, d'être en mesure d'identifier l'espèce présente au niveau des mycorhizes. L'utilisation exclusive des critères morphologiques n'étant pas suffisamment discriminantes, des techniques de détermination basées sur l'analyse du polymorphisme des acides nucléiques ont été développées. Après la mise au point d'une technique d'extraction de l'ADN à partir des mycorhizes, la deuxième étape a été l'identification de séquences caractéristiques des espèces de truffe.

RESULTATS :

La première étape du projet de recherche a consisté à mettre au point une technique d'extraction de l'ADN pouvant être utilisée en test de routine. Après avoir été récoltées, les radicelles mycorhizées sont broyées dans un mortier en présence d'azote liquide. Le broyat est récupéré et l'ADN total est purifié en utilisant le kit « Dneasy Plant Mini Kit » (5), suivi d'une purification sur colonne d'hydroxyapatite. Cette étape d'extraction/purification de l'ADN nous permet d'obtenir de l'ADN d'excellente qualité débarrassé des inhibiteurs des enzymes (Taq polymérase) utilisées pour amplifier cet ADN lors des étapes ultérieures. Les techniques de biologie moléculaire ont été appliquées, dès le début des années 1990, aux recherches sur la truffe (6-8) et elles reposent sur l'amplification sélective de fragments d'ADN du champignon par la réaction de polymérisation en chaîne (PCR). La méthode d'analyse moléculaire appelée SCAR (Sequence Characterized Amplified Region) a été choisie afin de pouvoir identifier de façon formelle le type de champignon présent au niveau des mycorhizes. Cette technique consiste à définir un couple d'amorces PCR qui amplifie une séquence d'ADN particulière à chaque espèce de Tuber. Les amorces appartiennent à un site précis du génome dont la séquence doit être à la fois conservée pour une espèce donnée et différente des séquences existantes chez les autres espèces. Des profils spécifiques d'une région de l'ADN ribosomique nucléaire appelé ITS (Internal Transcribed Spacer) (5, 9) ont été obtenus pour les 3 espèces ce qui nous a permis de mettre au point un test permettant l'identification de l'espèce présente au niveau des mycorhizes de l'appareil racinaire des plants truffiers. Ce test de réalisation simple, est spécifique, sensible, rapide, permettant sans aucunes ambiguïtés, l'identification des 3 espèces de truffe à forte convergence morphologique que sont : T. melanosporum, T. brumale et T. indicum.

REFERENCES :

1. COURVOISIER M 1992. Bilan de la filière truffe en France. Ctifl Paris.

2. CHEVALIER G and al, 1986. Taxonomie des truffes européennes. Mycorrhizae: physiologie and genetics, INRA, Paris 631-635.

3. CHEVALIER G, GRENTE J, 1979. Application pratique de la symbiose ectomycorhizienne : production à grande échelle de plants mycorhizés par la truffe. Mushroom Sci ; 10: 483-505.

4. FOURRE G, and al, 1996. Ces « truffes de l'Inde » qui nous arrivent de Chine ! Bull Fed Assoc Mycol Mediterr ; 9 : 3-21.

5. MABRU D and al, 2001. Rapid molecular typing method for the reliable detection of Asiatic black truffle (Tuber indicum) in commercialised products: fruiting bodies and mycorrhizal seedlings. Mycorrhiza ; 11: 89-94.

6. LANFRANCO L, and al, 1993. DNA probes for identification of ectomycorrhizal fungus Tuber magnatum Pico. FEMS Microbiol Lett ; 114: 245-252.

7. HENRION B, and al, 1994. Typing truffle species by PCR amplification of the ribosomal DNA spacers. Mycol Res ; 98: 37-43.

8. AMICUCCI A, and al, 1998. Identification of ectomycorrhizal fungi of the genus Tuber by species-specific ITS primers. Mol Ecol ; 7: 273-277.

9. WHITE TJ and al, 1990. Amplification and direct sequencing of fungal ribosomal RNA genes for phylogenetics. Dans PCR protocol. Academic Press, San Diego, California, 315-322.